Culture, sciences et société
Un séminaire de recherche sur les sciences et les technologies intitulée « Chasse aux fossiles et contrôle territorial » avec Victor Monnin, AHP-PReST UMR 7117 aura lieu le lundi 16 novembre à 17h45 en ligne.
Les paléontologues en « chasseurs de fossiles » est une métaphore incontournable, surtout lorsqu’il en va de fouilles à la recherche de dinosaures ou autres monstres préhistoriques. Elle doit à son ubiquité, en plus du second degré dont elle relève, d’être restée relativement non-problématisée parles historiens et philosophes des sciences géologiques. Nous proposons donc de prendre au sérieux cette image du paléontologue en chasseur et des fossiles en trophées, afin d’en extraire le potentiel heuristique. Si la métaphore de la chasse aux fossiles se popularise grandement avec la publication de récits d’expéditions paléontologiques dans l’Ouest américain à l’orée du XXe siècle, nous pouvons identifier ses premiers avatars, en particulier visuels, dès les premières décennies du siècle précédent. Retracer la généalogie du paléontologue-chasseur, figure hautement masculinisée, confère alors l’opportunité de reconsidérer l’histoire de la paléontologie en l’articulant à des questions de pouvoir et d’enjeux territoriaux. Comment la capacité grandissante des paléontologues à interpréter des restes et traces fossiles a-t-elle affecté l’organisation, voire la conquête, de territoires ? En nous concentrant sur deux études de cas, l’Algérie coloniale et la colonie de Nouvelle-Zélande dans la seconde moitié du XIXe siècle, nous souhaitons mettre en évidence les relations qui se tissaient alors entre la collecte de fossiles, le contrôle de territoires coloniaux et le sort réservé aux populations indigènes. S’attarder sur la métaphore négligée de la chasse aux fossiles permet ainsi d’apprécier l’histoire compliquée que l’élucidation du passé profond partage avec les rapports de forces militaires, politiques et symboliques ayant cours à la surface.